La Lettre 52 - page 15

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seul l’homosexualitéchez tous les individus. Troisscénarios
explicatifs sont possibles :
- soit il existedifférents types d’homosexualités. Certaines
sont d’origine génétique, d’autres d’origine hormonale.
D’autres encore seraient le résultat de l’effet de facteurs
biologiquesnon identifiés.
- soit les effets des différents facteurs biologiques qui ont
été identifiés interagissent entreeuxde façonvariablechez
chaque individu et ce n’est que lorsque plusieurs de ces
facteurs se conjuguent qu’une orientation homosexuelle
est observée.
- soit enfin, tous les facteurs biologiques que nous avons
décritsn’induisent quedesprédispositionsà l’homosexua-
lité et ces prédispositions ne sedévelopperont quedans
un contextepsycho-social donné non encoreprécisé. Les
études récentesdugroupedeMelissaHinesàCambridge
indiquant que l’actionprénataledesandrogènesmodifie la
socialisationdecomportements liésaugenre (e.g., imitation
dans l’utilisationd’objetsdéclarésouobservésêtre typiques
d’ungenredonné) sont àce sujet trèsprometteuses
(10)
.
Denombreusesquestions restent encoreensuspensmais
le rôle des hormones embryonnaires ne peut clairement
plusêtre ignoré. L’homosexualitén’est pas, pour lamajorité
des personnes, un choix librede vie. C’est souvent, voire
toujours, uneévidencequi s’imposeà l’individuaucoursde
sonadolescenceoudesaviede jeuneadulte.Onnechoi-
sit pas plus d’être hétérosexuel qu’homosexuel; on choisit
d’assumer ou non son orientation et éventuellement de la
révéler augrand jour,mais l’orientation sexuelleelle-même
n’estprobablementpas l’occasiond’unchoixdélibérépour
lamajoritédes individus.C’est unevariationbiologiqued’un
caractèrecomportemental complexeau contrôle éminem-
mentmultifactoriel.
R
éférences
(1) Balthazart, J., Biologiede l’homosexualité. On naît homosexuel, on ne
choisit pasde l’être. 2010,Wavre, Belgique:Mardaga. 299pages.
(2) LeVay, S., Gay, straight, and the reasonwhy. The scienceof sexual
orientation. 2011,NewYork:OxfordUniversityPress.
(3) Roselli,C.E., et al., FrontNeuroendocrinol, 2011. 32(2): 164-169.
(4)McFadden,D., FrontNeuroendocrinol, 2011. 32: 201-213.
(5) LeVay, S., Science, 1991. 253: 1034-1037.
(6) Hamer,D.H., et al., Science, 1993. 261: 321-327.
(7) Sanders, A.R., et al., PsycholMed, 2015. 45(7): 1379-88.
(8) Karpf, A.R., et al.,Mol CancerRes, 2009. 7(4): 523-535.
(9) Ngun, T.C. andE. Vilain, AdvGenet, 2014. 86: 167-184.
(10)Hines, M., et al., Philos TransRSoc LondBBiol Sci, 2016. 371(1688):
20150125.
Pourplusd’informations, voir également:
azart&part=1
-
ses-coutures?part=4
(Conférencede52min)
tiblesd’affectercetteorientation.Desévénementsextérieurs
telsqu’unstress intensepourraientêtre impliquésetbloquer
(partiellement) lamasculinisationde l’orientation sexuelle
desembryonsmasculins.Alternativement, desdifférences
génétiques pourraient affecter la synthèsedes hormones
stéroïdeschez l’embryonou lastructuredes récepteursqui
sont responsablesde leur actionauniveauducerveau.De
nombreuses études indiquent une contributiongénétique
significativeà l’orientationsexuelle: laconcordanced’orienta-
tionsexuelleentredeuxpersonnesestdirectementcorréléeà
leurparentégénétique. Il existenotammentuneconcordance
d’orientation2à4 foisplusgrandeentre jumeauxunivitellins
(vrais jumeaux) qu’entre jumeaux bivitellins (faux jumeaux
nésd’ovuleset de spermatozoïdesdifférents).
Cependant, leou lesgènesspécifiquement responsable(s)
reste(nt)à l’heureactuelle inconnu(s).Uneassociationentre
homosexualitémasculine et marqueurs génétiques de la
région télomériquedu chromosomeX (régionXq28) a été
identifiée
(6)
etconfirmée récemment
(7)
mais leou lesgènes
impliqués reste(nt) inconnu(s). Notons cependant que le
gèneMAGE-11quimodule lasensibilitéauxandrogènesse
trouveenXq28
(8)
etpourraitdonc fournirunebaseexplica-
tiveà l’androgénisationpartielledeshommeshomosexuels.
Par ailleurs la recherche récente indiqueque l’expression
des gènes est modifiéepar l’environnement de façon épi-
génétiquec’est-à-direpar unemodificationn’affectant pas
laséquencede l’ADNmaisaffectant seulement sonniveau
d’expression
via
modifications chimique de l’ADN et des
protéines (histones)qui l’entourent.Desmodificationsépigé-
nétiquessemblentbienêtreassociéesà l’homosexualité
(9)
.
Conclusions
Il existe donc un ensemble demécanismes biologiques
hormonaux et/ougénétiques qui semblent contribuer par
leur actionprénatale au contrôlede l’orientation sexuelle.
Lesconclusionsactuellessouffrentcependantde limitations
évidentes. Lesmodifications d’orientation sexuelle liées à
desperturbationsendocrinesembryonnairesneconcernent
jamais qu’une fractiondes sujets affectés (maximum 30 à
40%)etdonc60-70%aumoinsdessujetsgardentdansces
conditions leurorientationhétérosexuelle.Deplus, toutes les
corrélationsde l’homosexualitéavecdes traitssexuellement
différenciés qui suggèrent une imprégnation hormonale
embryonnaireatypiquenesontquepartielles.Si despopu-
lations homo- et hétéro-sexuelles diffèrent statistiquement
pourcescaractéristiques, celles-ci nepermettent jamaisde
déterminer l’orientationsexuelled’unsujetdonné.Parailleurs,
lesexplicationsalternativesbaséessur lapsychanalyse, la
psychologieou lasociologie,mêmesi ellessont largement
acceptées dans lepublic, ne sont pas engénéral basées
surdesétudesquantitativesobjectiveset n’apportentdonc
aucune information réellement scientifique à l’analyse du
phénomène.Cesexplications restent àcestadeplausibles
mais elles demanderaient à être testées par des études
quantitativesqui devraient êtreentreprises.
Il est cependant clair qu’aucun des facteurs biologiques
identifiés à l’heure actuelle n’est àmêmed’expliquer à lui
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