La Lettre 52 - page 11

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qui sont durables, permanents et irréversibles
(8)
, phéno-
mène aussi observépour les hormonesmétaboliques
(9)
.
À partir de la puberté, les stéroïdes gonadiques auront
des«effetsd’activation»sur lecerveau, effets récurrents,
temporaires et réversibles - pensons par exemple au rut
annuel chez lecerf ouaucaractèrecycliquede laphysiologie
féminine - qui sont sous-tendus par laplasticité cérébrale
neurogliale
(10)
(Figure2).
Tout bienconsidéré, ladifférenciation sexuelleducerveau
estunemiseenaccorddusexecérébralphénotypique (fonc-
tionnel) avec le sexegénétiquede l’organisme (Figure2).
On comprenddès lors que lesmécanismes d’actions des
stéroïdes gonadiques seront divers et multiples, et que la
dichotomieentreeffetsd’organisationetd’activation,comme
celleentrecerveaumasculinou féminin, n’est pasabsolue.
Parexemple, lapériodede lapubertémarque l’apparitionde
changements irréversiblesdans lecerveau,qui parailleurs
ensortiradotéd’unphénotypesexuel établi dansunconti-
nuum entremasculinité ou féminitépures. Ajoutons à tout
cela ladécouverteprogressivededéterminismespurement
génétiques (paroppositionàhormonaux)dusexecérébral,
sansoublier l’influencedes facteursextrinsèquesà l’embryon
(maternels, environnementaux, sociétaux,...)
(11, 12)
.
Quant à
Homo sapiens
, enbonPrimatedotéd’uncerveau
machiavélique
(13)
, chez lui le sexeprend unedimension
culturelle et politique. Pour l’instant, et enbonparasite, la
gonade s’enaccommode volontiers.
R
éférences
(1) DawkinsR. «Legèneégoïste» (nouvelleédition),Odile Jacob, 2003.
(2) LiowLH, eal., TrendsEcol. Evol. 2011, 26: 349-358.
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(13) ByrneRW,WhitenA. «Machiavellian intelligence: Social expertise
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UniversityPress, 1988.
celui-ci).Enfin,puisque lagonade initialementbipotentese
transformeen testiculesous l’actiondugèneSryportépar
lechromosomeY, ladifférenciationde l’appareil génital est
finalement sousundoublecontrôle,génétiqueet hormonal.
DifférenciationsexuelleduSNC: laconséquence
La testostéronequicirculedans tout l’embryonmâlecombine
lesactionsdedéféminisationetmasculinisationducerveau
(4)
.Cedernier sedéveloppedonccomme l’appareil génital
et porte, àun stadeprécoce, à la foisdespopulationsneu-
ronaleswolffiennes (dans l’amygdalemédiane, lit de lastrie
terminale,airepréoptiquemédiane,...)etmüllériennes (dans
l’airepréoptiqueantérieure,noyauhypothalamiqueventromé-
dian,etc.).L’énoncédecesstructuresanatomiques rappelle
qu’ellesappartiennentàunméta-réseau fonctionnel, le«sys-
tèmevoméronasal »,biendifférenciéchez lesTétrapodes,et
dont le rôleest de relier laperceptiond’information sociale
(initialement phéromonalepuismultimodale) avec l’activité
gonadique, c’est-à-diredepermettre lacoïncidence interin-
dividuellede lacoordinationentre fertilitéet comportement
(sexuel,parental).Pour l’essentiel, lesconnaissances relatives
auxmécanismesde ladifférenciation sexuelleducerveau
desmammifères ont été obtenues à partir de cemodèle
favorableque constitue le système voméronasal chez les
rongeurs
(5)
,avantd’êtregénéraliséesà l’ensembleduSNC
etdesespècesycompris l’humainavec l’essorde l’imagerie
médicale
(6)
.Des résultats importantsont aussi étéobtenus
chez lesoiseauxquiprésententundimorphismesexuelmar-
quéducomportement et de l’anatomiecérébrale
(7)
.
DifférenciationsexuelleduSNC:mécanismes
La notiondedimorphisme sexuel cérébral, prisedans sa
plus stricte acception, signifie une différence entre-sexe
d’originedéveloppementale, c’est-à-direpersistanteaprès
gonadectomie chez l’adulte. Revenons donc encore une
foischez l’embryon.En l’absenced’androgènescirculants,
seules lesstructuresmüllériennesse retrouventchez l’adulte,
et réciproquement concernant l’empreinte testiculaire.Cette
différenciation sexuelledu cerveau s’effectuedurant une
période critique (périodepérinatale chez leRat) de sensi-
bilitédes réseaux neuronaux et se traduit à la fois par des
programmationsmorphogénétiquesetphénotypiques.Ainsi,
les stéroïdes gonadiques ont des «effets d’organisation»
Figure2 -
Lecerveaubipotentde l’em-
bryonsubitunaiguillagedéveloppemental
déterminépar lanaturede lagonade:
c’est ladifférenciationsexuelleduSNC,
ou«Organisation», quia lieupendant la
périodepérinatale.L’organisation femelle
s’installe«pardéfaut», carsaprogram-
mationsedéclenchede façonspontanée.
L’organisationmâlese fait endeuxétapes,
déféminisationetmasculinisation, essen-
tiellementdéterminéespar lesandrogènes
circulants.Leréveilde lagonadeà la
pubertémarqueune«Activation»des
réseauxneuronauxde lareproduction.
Lesactionscombinéesd’organisationet
d’activationconfèrentauSNCsonsexe
phénotypique (fonctionnel).
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