La Lettre 44 - page 14

La lettre
n°44
ossier
de fuseaux de sommeil, éléments typiques du stade 2.
La présentation de la mélodie au cours du sommeil a permis
de faciliter la consolidation de cet apprentissage. Ces études
indiquent donc que la présentation au cours du sommeil
d’un indice lié à la tâche favorise la réactivation du souvenir
associé à cet indice et démontrent le rôle causal des phéno-
mènes de réactivations dans la consolidation des souvenirs.
Outre les réactivations d’ensembles neuronaux, les ondes
lentes de type delta, caractéristiques du SLP, participent acti-
vement au processus de consolidation des souvenirs. Ceci a
été démontré grâce à la technique de stimulation électrique
transcrânienne
(5)
. En effet, si l‘on applique, en début de
nuit, de faibles stimulations électriques au niveau des aires
frontales, à une fréquence mimant celle des ondes lentes
endogènes, la rétention de paires de mots est améliorée,
par rapport à une condition placebo. Ce type de stimulations
frontales à cette fréquence particulière augmente la quantité
d’ondes lentes et de fuseaux de sommeil mais n’a aucun
effet sur un apprentissage procédural.
Enfin, l’environnement neurochimique est également crucial
pour la réorganisation des traces mnésiques au cours du
sommeil. En effet, le processus de consolidation en mémoire
épisodique ne peut opérer que si les niveaux d’acétylcholine
et de cortisol sont faibles en début de nuit.
Les travaux exposés jusqu’ici ont permis d’affiner un modèle
proposé dès 1996 sous le terme de
dialogue hippocampo-
néocortical
(6)
et visant à expliquer la consolidation des
souvenirs en mémoire épisodique au cours du sommeil.
Ainsi, les traces mnésiques récemment acquises seraient
réactivées au sein d’ensembles neuronaux hippocampiques
lors des épisodes de SLP puis transférées progressivement
vers différentes aires néocorticales, pour un stockage à long
terme. Ce transfert opérerait notamment grâce aux ondes
lentes et aux fuseaux de sommeil. L’existence d’une telle réor-
ganisation des réseaux cérébraux sous-tendant le rappel des
souvenirs a été démontrée, et ce de manière plus importante
chez des sujets ayant dormi après l’apprentissage compa-
rés à des sujets privés de sommeil. Il est probable qu’un
mécanisme comparable, impliquant toutefois des régions
cérébrales différentes, soit mis en jeu pour la consolidation
des apprentissages procéduraux. Une approche alternative,
appelée théorie de l’
homéostasie synaptique
(7)
, a également
été proposée. Selon cette conception, le sommeil à ondes
lentes (i.e., SLP) permettrait un recalibrage de l’activité des
synapses potentialisées au cours de la journée, en gardant
toutefois une trace des expériences passées, c’est-à-dire en
maintenant une différence entre les synapses potentialisées
à l’éveil et celles qui ne l’ont pas été. À l’appui de cette hypo-
thèse, on observe une augmentation locale de la densité des
ondes lentes dans une région cérébrale impliquée, à l’éveil,
dans une tâche d’adaptation motrice. Cette augmentation
est par ailleurs corrélée à l’amélioration des performances
après la nuit de sommeil.
des apprentissages procéduraux ou pour consolider les
différentes facettes d’un souvenir épisodique. L’organisation
cyclique des différents stades de sommeil au cours de la
nuit serait également importante, reflétant la succession des
traitements opérant sur les traces mnésiques. Toutefois, la
nature des traitements opérant au sein de chaque stade de
sommeil reste à préciser.
Quels sont les mécanismes expliquant l’effet béné-
fique du sommeil dans le processus de consolidation
mnésique ?
Plusieurs études réalisées à partir d’enregistrements de cel-
lules de lieux du champ CA1 de l’hippocampe ont montré que
les cellules qui déchargeaient ensemble lorsqu’un rongeur
occupait une position particulière de l’espace déchargent à
nouveau ensemble au cours du sommeil qui suit l’apprentis-
sage, principalement au cours des épisodes de SLP. De telles
réactivations ont également été observées chez l’Homme,
grâce à l’imagerie fonctionnelle. Ainsi, l’hippocampe activé
lors d’une tâche de navigation spatiale est à nouveau activé
au cours des épisodes de SLP. De manière intéressante, plus
cette région est réactivée au cours de la nuit, plus l’amélio-
ration des performances le lendemain est importante
(1)
.
L’activation hippocampique lors de l’encodage serait par
ailleurs un signal crucial indiquant au cerveau que le maté-
riel doit être consolidé au cours de la nuit
(2)
. Différentes
études ont ensuite tenté de moduler ces phénomènes de
réactivation au moyen de stimulations externes. Ainsi, Rasch
et collaborateurs
(3)
ont proposé une épreuve consistant à
associer une image et une localisation spatiale et ont vapo-
risé, lors de la séance d’apprentissage, une odeur de rose.
Le fait de présenter à nouveau l’odeur au cours du SLP
améliorait significativement les performances des sujets.
Aucune amélioration n’était observée si une odeur différente
était vaporisée ou si l’odeur de rose était présentée pendant
une phase de SP. De plus, la présentation de l’odeur au cours
du SLP induisait une activation de l’hippocampe suggérant
que l’odeur constituait un indice permettant de réactiver le
souvenir. Très récemment, Antony et collaborateurs
(4)
ont
proposé à des sujets d’apprendre à jouer deux mélodies
différentes. Après la phase d’apprentissage, les sujets ont
bénéficié d’une sieste au cours de laquelle une seule des
deux mélodies était à nouveau présentée. Après la sieste,
les performances pour la mélodie indicée (c’est-à-dire celle
représentée pendant le sommeil) étaient significativement
meilleures que celles pour la mélodie non indicée. De plus,
l’amélioration des performances avant/après la sieste était
positivement corrélée au temps passé en SLP et au nombre
... « l’hippocampe activé lors d’une tâche de
navigation spatiale est à nouveau activé au
cours des épisodes de SLP. »...
... « La présentation de la mélodie au cours du
sommeil a permis de faciliter la consolidation
de cet apprentissage»...
1...,4,5,6,7,8,9,10,11,12,13 15,16,17,18,19,20,21,22,23,24,...34
Powered by FlippingBook