La Lettre 44 - page 24

La lettre
n°44
ouveautés en neurosciences
La révolution de l’imagerie nanoscopique
pour la neurobiologie cellulaire
|
PAR DANIEL CHOQUET
L’élucidation du fonctionnement intime du système nerveux et de
sa plasticité requiert une bonne compréhension de l’organisation
et de la dynamique des molécules et compartiments des cellules
qui le compose. L’imagerie photonique est idéalement adaptée
à l’étude de la dynamique cellulaire. Toutefois, bon nombre de
spécialisations structurelles neuronales telles que les synapses sont
impossibles à résoudre par microscopie optique conventionnelle en
raison de la limite de résolution imposée par la diffraction.
Introduction : de la nécessité d’une imagerie nanosco-
pique en Biologie/Neuroscience
Le développement récent de plusieurs méthodes d’imagerie
nanoscopique - ou super résolution - qui ont une résolu-
tion 2 à 10 fois supérieure à la microscopie conventionnelle
ouvre de nouvelles portes pour l’analyse de la dynamique
de l’architecture moléculaire des neurones. L’avènement
il y a plus de 30 ans de la microscopie par imagerie de
fluorescence a été une révolution qui a donné accès non
seulement à la localisation multi couleurs spécifique de com-
posants cellulaires mais également à l’imagerie dynamique
de ces éléments sur cellules vivantes. Cependant, l’ima-
gerie de fluorescence a, jusque là, été limitée pour l’iden-
tification de l’organisation cellulaire sub-microscopique.
En effet, une propriété fondamentale de la lumière, la dif-
fraction, constitue un obstacle majeur pour résoudre les
objets qui se trouvent à moins d’une demi-longueur d’onde
lumineuse les uns des autres. Ainsi, un microscope optique
conventionnel ne permet pas de distinguer deux objets sé-
parés de moins de 200-250 nm. Cette limite est trop faible
pour résoudre la morphologie détaillée d’objets de niveaux
moléculaires à subcellulaires. L’étude de l’architecture et de
l’organisation moléculaire d’éléments subcellulaires micromé-
triques fondamentaux tels que les synapses a donc reposé
principalement sur l’utilisation de la microscopie électronique
(ME) de part l’excellente résolution (de l’ordre du nm) et le
contraste sur la structure des organites, y compris leurs
aspects membranaires, qu’elle apporte. Cependant, la ME
ne permet pas de visualiser la dynamique interne de cellules
vivantes et est plus limitée dans sa capacité de marquages
multiples que la microscopie de fluorescence.
L’invention récente des techniques de microscopie super
résolution (ou nanoscopies) permet de dépasser la limite
de résolution de la microscopie optique conventionnelle en
conservant les avantages de l’imagerie de fluorescence,
et notamment la compatibilité avec l’imagerie du vivant.
Ces nouvelles méthodes possèdent un énorme potentiel
d’applications en neurosciences
(1-3)
. Elles peuvent être
globalement séparées en deux grandes catégories. D’une
part les méthodes qui utilisent un faisceau lumineux mis
en forme pour déterminer précisément la localisation des
fluorophores capables d’émettre des photons dans l’échan-
tillon (l’illumination structurée SIM, l’émission stimulée STED
et sa forme généralisée RESOLFT4). D’autre part les mé-
thodes basées sur la localisation de molécules individuelles
dont la fluorescence est activé de manière stochastique
(STORM, dSTORM, GSDIM, PALM, FPALM et U-PAINT, voir
tableau 1 la liste des principaux acronymes). Ces méthodes
ont permis d’obtenir des images d’échantillons biologiques
en trois dimensions avec des résolutions tridimensionnelles
(3D) de l’ordre de 20 nm.
Microscopie par déplétion de fluorescence par émis-
sion stimulée (STED)
La microscopie STED est une technique basée sur la mise
en forme de l’émission lumineuse
(4)
. Le STED supprime
l’émission de uorescence à la périphérie de la tache de
diffraction d’un faisceau laser d’excitation gaussien focalisé
par un processus appelé émission stimulée. Dans ce but,
un second faisceau laser en forme d’anneau (doughnut)
de haute intensité avec un centre à zéro est aligné avec le
faisceau d’excitation. Le premier faisceau laser excite le
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... « un microscope optique conventionnel ne
permet pas de distinguer deux objets séparés de
moins de 200-250 nm. » ...
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