La Lettre 50 - page 22

La lettre
n°50
ossier
dans l’adolescenceet audébut de l’âgeadulte (11-20ans)
(Figure). Il est intéressant denoter que si les odeurs ont le
pouvoird’initier le rappel desouvenirsauxcaractéristiques
bien singulières, elles ne permettent pas pour autant de
rappeler plusde souvenirs.
Lescorrélatsneuronauxdu«phénomènedeProust »
Le lien très fortqui existeentreolfactionetmémoirepeutêtre
à rapprocherde l’anatomiedusystèmeolfactif.Cedernierse
distinguedesautressystèmessensorielspar le fait que les
airesolfactivesappartiennent toutesausystème limbiqueet
àce titresont fortement impliquéesdans lesprocessusémo-
tionnelsetmnésiques. Lecortexolfactif primaire regroupe
l’amygdale qui constitue la porte d’entrée des émotions,
essentielledans laperception et lamémoire émotionnelle
humaine, et lecortexentorhinal latéral, étroitement liéà l’hip-
pocampe,qui représenteunestructureclef dans l’encodage
et le rappel de nombreuses formes demémoire. Deplus,
dans lesautresmodalitéssensorielles, lesystème limbique
n’est atteintqu’aprèsdemultiples relaiscorticauxdansdes
régionsassociativesdehaut niveauet aprèspassagepar le
thalamus, siègede l’intégrationsensorielle.Dans lesystème
olfactif, lesprojectionsolfactivessur lesystème limbiquesont
directeset ne transitent paspar le thalamus.
Malgré le fort potentiel des odeurs à rappeler des souve-
nirsautobiographiquesvivides, émotionnelsetdétaillés, les
basesneuronalesdecettemémoirenesontquepeuexplo-
réesàce jour (pour revue,
7
).Danscesétudesqui visent à
comparer l’impact de lamodalitéde l’indicede rappel sur
lesprocessus cérébraux, l’évocationde souvenirspar des
odeurs recrutedavantage lecortexpiriforme, lecortexpara-
hippocampique, l’amygdaleet legyrusoccipitalmoyenque
lorsque lessouvenirssont évoquéspar lavueou lenomde
lasourceodorante. Lesprocessusmnésiques, émotionnels
et d’imageriementalevisuellesous-tenduspar ces régions
sontdoncplus importants lorsque lesparticipantsse remé-
morent des souvenirs personnels indicés par des odeurs
que lorsqu’unautre
stimulus
sensoriel est utilisé.
Lamémoiredes
stimuli
olfactifs
La reconnaissancedes
stimuli
olfactifsdéjà rencontréspré-
sente-t-elle elle aussi des particularités ? Les premières
étudesen laboratoireportant sur lesperformancesdemé-
moire de reconnaissance des odeurs datent des années
1970. Dans un premier temps, pendant la phase d’enco-
dage, unensembled’odeursestprésentéauxparticipants.
Dans undeuxième temps, après unephasede rétention,
laphase test a lieu, dans laquelle les participants doivent
reconnaîtredesodeursanciennes (cibles)parmidesodeurs
nouvelles (distractrices). Àcetteépoque, il estmontréque
lamémoire des odeurs est très robuste et durable
(8)
.
Bienque lesodeurssoientmoinsbien reconnuesdans l’ins-
tantque les images, lesouvenird’odeursapprisesau labora-
toire résistemieuxau tempsque lesouvenird’images. Tou-
tefois, alorsque l’idéed’unemémoiredesodeurs inaltérable
aperduré longtemps, des études ultérieures contredisent
ce résultat etmontrent que lamémoirede reconnaissance
olfactiven’estpas insensibleà l’oubli etdépendénormément
descaractéristiquesdu jeud’odeurs.Demanièregénérale,
plus une odeur est distinguabledes autres, que ce soit en
termesdequalité, devalenceémotionnelle, oudequantité
d’informationssémantiquesque l’onpeut lui associer,mieux
elleest reconnue.
Mémoiresolfactives : l’apport desmodèlesanimaux
Chez le rat, l’odorat représente lamodalitésensorielledomi-
nante. Cemodèle animal nous permet donc d’étudier le
traitement d’un type d’information qui joue naturellement
un rôledéterminant dans l’organisationducomportement.
Ladiversitédes tâchescomportementalesbaséessur des
stimuli
olfactifsque les ratssont capablesd’apprendreest à
elleseuleunargument fortpourutiliser leur systèmeolfactif
commemodèled’étudedesmécanismesneurobiologiques
impliquésdans l’apprentissageet lamémoire (pour revue,
9
).
Dès lespremiersétagesde traitement des
stimuli
olfactifs,
onobservedesmodificationsanatomo-fonctionnellessuite
à différentes formes d’apprentissages olfactifs depuis la
simple répétitiond’uneodeur jusqu’àdesconditionnements
associatifs complexes. Sans grande surprise, toutes les
structuresclassiquement impliquéesdans lessystèmesde
mémoirequesont l’hippocampeet sescortex,ou l’amygdale
et lecortex orbito-frontal voient également leur fonctionne-
ment modifié à la suited’un apprentissage olfactif. L’enjeu
àprésent est d’aller unpeuplus loinenmettant au jour les
interactions dynamiques qui s’établissent entre les aires
sensoriellesolfactiveset lesstructuresmnésiquesetquiper-
mettentàun
stimulus
olfactif d’êtreencodédanssoncontexte
deprésentation, puis reconnuou associéàun événement
Figure
-Proportionde souvenirsautobiographiquesévoquéspardesodeurs, desmotsoudes imagesen fonctionde l’âgedeces
souvenirs (Issude (6) ;adaptéde (5)).
1...,12,13,14,15,16,17,18,19,20,21 23,24,25,26,27,28,29,30,31,32,...41
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