La lettre
n°51
ossier
| coordonné
parAnneDidieretYves Tillet
avec lacollaborationdeRolandSalessE
L’olfaction :de lamoléculeaucomportement
(suite)
Les découvreurs de la neurogenèse
adulte
Sébastien Sultan et Nathalie Mandairon
(NEUROPOP - Neuroplasticité et Neuropathologiede la
PerceptionOlfactive, CentredeRecherche enNeuros-
ciences deLyon InsermU1028 - CNRSUMR5292Univer-
sitéClaude-Bernard Lyon1, Lyon)
«
Lecerveauadulteestunorgane immuable, toutpeutmourir,
rien nepeut régénérer
». Audébut duXX
e
siècle, la notion
d’un cerveau « figé» à la fin de sa formation, n’évoluant
que dans le sens de la dégradation, a longtemps été un
dogmecentral influencépar lesobservationset les idéesdu
pèrede la neurobiologie et PrixNobel espagnol, Santiago
Ramón yCajal.
Nous savons aujourd’hui que cette notion est dépassée et
que le cerveau est un organe dynamique capable d’une
incroyable plasticité. Cette plasticité cérébrale s’illustre
notamment par l’existence d’une restructuration illimitée
desconnexionssynaptiques,maiségalementpar le faitque
desmilliers de nouveaux neurones sont produits chaque
jour, àpartirdecellules-souchesneurales. L’existenced’une
neurogenèseadulte futdécritepour lapremière foisdans les
années1960et allaitprovoquerquelquesannéesplus tard,
un séismedans lemondedesNeurosciences.
Lepremier àproposer l’existenced’une activitémitotique
dansuncerveau
demammifèreadulte fut leneurobiologiste
Josef Altman.Dansuneséried’étudespubliéesentre1962
et1969,Altmanutilisade la thymidine tritiée ([3H] thymidine),
un isotope radioactif de la thymidine, capable d’intégrer
l’ADNdes cellules au cours de sa synthèse. Cette tech-
nique permettait demettre en évidence, après révélation
de l’isotope, lescellulesendivisiondans lesheuressuivant
l’administrationde [3H] thymidine (1). Josef Altmanobserva
ainsi un nombre non négligeablede cellules ayant intégré
l’isotope radioactif dans l’hippocampedecerveauxde rats
adultes suggérant l’existence de neurones nouvellement
formésdansuncerveauadulte.
À l’époque, ses travaux se heurtèrent au scepticisme de
la communauté scientifique encore très influencéepar les
dogmes imposés par les travaux et écrits de S. Ramón y
Cajal. De plus, la technique utilisée dans ces premières
études nepermettait pasdepréciser demanièreconvain-
cante lephénotypeneuronaldescellules identifiées.Eneffet,
laprésencedecellules-souchesneuralesdansuncerveau
adulten’ayant pasencoreétédémontrée, l’existenced’une
neurogenèse adulte sous-entendant uneactivitémitotique
neuronale, allait à l’encontredes basesmêmes de la neu-
robiologiede l’époque. Deplus, bienqu’il ait étédémontré
que la [3H] thymidine intégrait principalement l’ADNdes
cellulesendivision, il nepouvait pasêtreexcluque lescel-
lules observées par Altman aient étémarquées au cours
d’un cycle de réparation de l’ADN. Dans ce contexte, les
observationsd’Altman furent considéréescommeunsimple
artefact et furent ignorées.
Unpeuplus tard, dans lesannées1970, lesdonnéesobte-
nues par FernandoNottebohm
, de l’UniversitéRockefeller,
relancèrent ledébat. Au cours de leurs travaux sur l’étude
du dimorphisme sexuel du cerveau des canaris adultes,
Nottebohm et son équipe observèrent desmodifications
duvolumedecertaines régionscérébralesen fonctiondes
saisonsetdusexechez l’oiseau.Eneffet, lescanarismâles,
présentaientuneaugmentationsignificativeduvolumed’une
région impliquéedans le traitement et l’élaborationduchant
(highvocal center,HVC)aumomentde leurmaturitésexuelle.
Pourcomprendre lesmécanismessous-jacentsàcesmodifi-
Continuonsnotrevoyagedans lemondede l’olfaction
,
encommençantpar lescellules-
souchesolfactiveset lescapacitésdu systèmeolfactif à se régénérerperpétuellement.
CeDossierabordeégalement lesperformancesolfactives surprenantesd’autresespècescomme lesoi-
seaux, lesbatracienset les insectes, ladiversitédespréférencesolfactivesentre les sociétéshumaines,
etpour terminervousdécouvrirez l’olfaction«
in vitro
»desnezartificiels.
Sur touscesaspects, nousavonsdemandéauxmeilleures spécialistesde faire lepoint.
Bonne lecture, accompagnéedesparfumsde l’encreetdupapier…
