La Lettre 51 - page 8

La lettre
n°51
istoiredesNeurosciences
Cette hypothèse avait été rapidement confortéepar ladé-
monstrationde laprésenced’acétylcholinedans une frac-
tionde « synaptosomes»du cerveau et unpeuplus tard
dansune fractionvésiculairebienplus richeenacétylcholine
obtenue à partir de l’organe électrique de torpille (Israël
et al., 1968). Cependant, aucune corrélation claire n’avait
pu être apportée entre une excitationde la fibre nerveuse
motriceet lenombredevésiculesprésentesdans les termi-
naisonsnerveuses,et les imagesd’exocytoseétaient rareset
erratiques, sansdouteen raisondu fait que lesparamètres
temporelsde l’exocytosesontd’unautreordredegrandeur
queceuxde lafixationchimique imposéepour l’observation
enmicroscopie électronique, dumoins jusqu’à lamise au
point des techniquesdecongélationultra-rapide.
Couteauxet Pécot-Dechavassineallaient apporter une im-
portante contribution en faveur de l’hypothèse vésiculaire
(1970, 1974) par l’observation, sur desmuscles fixés aux
aldéhydes, d’imagesd’ouverturedevésiculessynaptiques
dans la fentesynaptiqueauniveaudes«zonesactives»du
buissondeKühne.Ces images justifiaient aussi l’appellation
« zones actives », puisqu’il s’avérait que l’ouverture des
vésicules n’avait lieuqu’à ce niveau, à l’exclusionde toute
autre régionducontact neuromusculaire.Cetteobservation
allait être confirméepar la cryofracture après congélation
ultrarapidedemusclenonfixéparHeuseretReeseen1974.
Unnouvel argumentà l’appuide l’hypothèsevésiculaireallait
bientôt être apportépar Couteaux et Pécot-Dechavassine
(1972) par ladémonstrationd’une corrélation entre l’exis-
tencedepotentielsminiatures«géants», correspondant à
la libérationsimultanéedeplusieursquantad’acétylcholine,
et laprésencedans les terminaisons de vésicules synap-
tiques géantes disséminées au seinde lapopulationdes
vésicules habituelles. Ceci apuêtreobtenudansdiverses
conditions expérimentales, en particulier sous l’effet de
concentrations adéquates de vinblastine. Au cours de ce
travail, s’est également imposée l’idéed’unehétérogénéité
des vésicules synaptiques, certaines se révélant plus sen-
siblesqued’autresà la fixationchimique.
Ces importantesobservationsn’ontpasempêchéCouteaux
de souligner quedes zones d’ombre subsistaient dans le
tableaudesmécanismesde la transmissioncholinergique.En
particulier le faitque l’acétylcholineest synthétiséeparune
choline-acétyltransférasecytoplasmiqueentraînequ’il existe
unpool d’acétylcholinenonvésiculaire,dont unepartiepeut
avoirundevenir fonctionnel nepassantpaspar lesvésicules
synaptiques, selonunmécanismenonencoreélucidé.
En conclusion, il apparaît que les contributions originales
deCouteaux à la cytologiede la jonctionneuromusculaire
ont porté sur (1) ladémonstrationde l’existenced’unedis-
continuité entre fibre nerveuse et musculaire au niveau
de la jonction neuromusculaire, marquéepar laprésence
d’un appareil sous-neural, différenciationde lamembrane
plasmiquede la fibremusculaire ; (2) ladémonstration en
microscopieélectroniqued’unensemblededifférenciations
tant présynaptiques quepostsynaptiques, dont certaines
avaient déjàétéobservéespard’autresdans lessynapses
interneuronales et sur l’interprétation cytophysiologique
etPécot-Dechavassineontmontréquecesdifférenciations
présynaptiques se retrouvent très régulièrement en face
de l’ouverturedechaquepli de l’appareil sous-neural dans
l’espacesynaptique.Chacunedecesdifférenciationsappa-
raîtcommeun ruban triangulairedensecolléparsabaseà la
face internede lamembraneprésynaptique ; situédansune
légèresailliedu rameaunerveuxdans l’espacesynaptique,
il s’étendd’unbordà l’autrede lagouttièresynaptiqueet est
flanquédechaquecôtéd’une rangée régulièredevésicules
synaptiques.
Ducôtépostsynaptique, lamembraneplasmique (
plasma-
lemme
)musculaireest doubléeentre lesplissous-neuraux
etdans lapartie initialedeceux-ci d’unecouchedense,que
Couteaux a nommé la « strate adhérente». Ceci l’amène
à distinguer dans les plis sous-neuraux une « zone ves-
tibulaire» pourvue d’une strate adhérente, et une « zone
profonde»,oùsesituentdes invaginationsduplasmalemme
ou
caveolae
,généralement considéréescomme liéesà l’en-
do-exocytose. ChezcertainsMammifères, et enparticulier
chez l’Homme, les plis sous-neuraux, qui s’enfoncent plus
profondémentdans lafibremusculairequechez lagrenouille,
peuvent s’anastomoserpar leurpartieprofondepour former
un véritable labyrinthe ; en outre, ils peuvent seprolonger
en tubules transversauxparticipant aux triadesde la région
sous-synaptique, montrant ainsi que les relations duplas-
malemmeavec lesystèmeTnesontpas fondamentalement
différentesauniveaude lasynapsedecequ’ellessontdans
lesautrespartiesde la fibremusculaire.
Entre lesplissous-neuraux,dansdesconditionsdefixation
et d’usage de contrastants appropriés, on peut observer
au-delà de la strate adhérente et tangentiellement à elle
un feutrage de filaments ; plus profondément, dans l’axe
de chaque interpli, on trouve un «cylindre sous-neural »
forméd’un ruban central dense àpartir duquel rayonnent
defins trabéculeszigzagantentre le rubanet le feutragedes
filaments sous-neuraux. Ces cylindres sont raccordés à la
membraneplasmiquemusculairepar leurs extrémités ; ils
sont traverséspar placespar desdiverticulesdu reticulum
sarcoplasmique contournant le ruban central (Couteaux
et Pécot-Dechavassine, 1974 ; Couteaux, 1980) Au point
d’attachedu rubanà lamembranede l’interpli sous-neural,
la strate adhérente est interrompue. Enfin, il faut souligner
l’existence de grandes différences dans la structure des
cylindres sous-neuraux et leurs rapports avec le reticulum
sarcoplasmiqueselon le type fonctionnel de lafibremuscu-
laire, lent, rapideou intermédiaire.
Cytophysiologiede la transmissioncholinergiqueà la
jonctionneuro-musculairede lagrenouille
Ladémonstrationde la nature «quantique»de la libéra-
tion de l’acétylcholine à la synapse neuromusculaire par
ladécouvertedes potentiels deplaqueminiatures (Fatt et
Katz, 1952), suiviepeuaprèsdecelledesvésiculessynap-
tiques,amenèrentà la formulationde l’hypothèsevésiculaire,
selon laquelleunquantumd’acétylcholinecorrespondraitau
contenud’unevésiculesynaptique libéréparexocytosedans
l’espacesynaptique (Del Castilloet Katz, 1955).
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