La Lettre 49 - page 10

La lettre
n°49
ossier
Jean-Marie Besson, co-fonda-
teur et premier président de la
Société des Neurosciences
| PAR MICHEL HAMON, Didier Bouhas-
sira, Luis Villanueva
Presqu’uneannées’est écouléedepuisqueJ.-M.Bes-
sonnousaquittés, et lesouvenir et l’émotionsont tou-
joursaussi forts. Il a tellementdonnéà touteset tousqui
onteu lebonheurde lecroiserdans leursparcourspro-
fessionnel et personnel qu’il resteraà jamais l’unedes
personnalités lesplusmarquantesdenotrediscipline.
Etpasseulementparcequ’il aété leco-fondateuret le
premierPrésidentdenotreSociétédesNeurosciences.
Jean-Marie, c’est d’abordbien sûr uneœuvre scien-
tifique de tout premier ordre. Il fait partie des rares
chercheursdont les travauxont étédéterminantsdans
les évolutions, voire les révolutions, conceptuelles
qui ont modifié en profondeur notre connaissance.
J.-M.Bessonaétéun leader international pendantplus
d’unquart de siècle (1970-2000) dans ledomainede
la physiologie et de la pharmacologie de la douleur,
avecdescontributionsqui ont euun impact direct sur
la prise en charge des patients. On lui doit en parti-
culier ladécouvertede l’action inhibitricedirectede
lamorphine au niveau de la corne postérieure de la
moelle épinière, qui a conduit audéveloppement de
l’administration intrathécaledemorphiniques, encore
très largement utiliséede nos jours pour soulager les
patientssouffrantdedouleurs réfractaires. Jean-Marie
a également été l’un des pionniers dans l’étude des
systèmesdemodulationde ladouleur,qu’il a initiéedès
ledébut desannées1970. Il anotamment contribuéà
lamiseenévidencede l’actionanalgésiquepuissante
de lastimulationdecertaines régionsdu tronccérébral,
comme le noyau raphémagnus et la substancegrise
périaqueducale. Cettedécouverteconstituede fait la
véritablebasescientifiqueà l’utilisationdes techniques
deneuromodulationqui ont connuundéveloppement
considérableaucoursdes vingt dernièresannées.
La reconnaissance internationalepoursescontributions
pionnières en recherche « translationnelle » s’est tra-
duitepardenombreuxprixprestigieux (Bristol-Myers-
Squibb, JJBonicaAward,FrederickWilliamKerrAward,
entreautres).
Jean-Marie, c’est aussi une École, avec la fameuse
«U161»de l’INSERMqu’il acrééeetdirigéeavecbrio
pendantpresque trenteans (jusqu’en2003)etoùontété
formés laplupartdes leadersactuelsdenotrepaysen
matièrede recherchesur ladouleuret ses traitements,et
oùsontpassées toutes lespointures internationalesdu
domaine. Il fautdireque lavisiteaubâtimentdu«2, rue
d’Alésia»yétait nonseulement l’occasiond’êtreau fait
desdernièresavancéesetd’engagerdesdiscussions
toujours trèsenrichissantes,maisaussi d’y trouverune
ambiance chaleureuse, empathique, familiale. C’était
d’ailleurscettemêmeatmosphèrequeJean-Mariegé-
nérait tout naturellement dans les nombreux congrès
nationaux et internationaux auxquels il nous invitait si
généreusement.Nousn’enciteronsquedeuxdontceux
qui en étaient se souviennent sûrement : Beaune (en
1987, lesHospices !) et Berlin (en 1989, aumoment
mêmede lachutedumur), avec la«Science»auplus
haut niveau, etdesmomentsdedétenteensoiréevrai-
ment uniques !
Jean-Marie, c’est aussi l’engagement généreux,
sincère, chaleureux, nonseulementpour soutenirnotre
discipline et tous ses acteurs, les jeunes tout particu-
lièrement, à l’INSERM (où il aprésidé la commission
des neurosciences, a étémembreduCODIS, etc.) et
dansbeaucoupd’instancesscientifiquesnationaleset
internationales, mais aussi pour promouvoir unemeil-
leurepriseenchargesociétalede ladouleurauxcôtés
depolitiques comme le sénateur LucienNeuwirth, et
àchaque foisqu’il avait l’opportunitéd’intervenir dans
lesmédias.
Malgré tous ses succès, et sa position nationale et
internationaleau tout premier plan (il aprésidé
l’Inter-
nationalAssociation for theStudyof Pain
qui regroupe
plusieursmilliers de chercheurs et cliniciens partout
dans lemonde), Jean-Marie n’a jamaismis de dis-
tancehiérarchiqueavecun interlocuteur,quel qu’il soit.
Dès la première rencontre, son humanité confiante
mettait à l’aise, et donnait l’espoir qu’il veuille bien
devenir unami.Noussommesnombreuxàavoir euce
bonheur et ce privilège, et particulièrement heureux
aujourd’hui de l’hommage qui lui est rendu dans ce
numérode la
LettredesNeurosciences
.
J
e
a
n
-
M
a
r
i
e
B
e
s
s
o
n
1,2,3,4,5,6,7,8,9 11,12,13,14,15,16,17,18,19,20,...43
Powered by FlippingBook