La Lettre 51 - page 29

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«Les Parfums de l’âme», jouée en 2012-2013, mettait en
scène«sixpersonnagesenquêted’odeur»venantchercher,
dans une usinedu futur, un flacon contenant leparfumde
leurschersdisparus (fig.2).En2015,uneentreprise,Kalain,
s’est crééeprécisément danscebut. Leursclientspeuvent
retrouver l’odeurde l’êtreaimé,desparentsdésirent conser-
ver lasignatureolfactivede leurbébé,ouencoredesmaîtres
veulent garder une tracede leur animal decompagnie.
Mais le«clou» fut la représentationde«GreenAria:Ascent
Opera» auMuséeGuggenheimdeNewYork, une pièce
de 14minutes, jouée dans le noir, avec seulement de la
musique et trente-trois (!) parfums conçus par Christophe
Laudamiel. Sur la tramed’une lutteentre la techniqueet la
nature, des personnages aussi abstraits (mais néanmoins
parfumés) que le « Zéro absolu » ou « Le Chaos » ou
«LeVert Evangélique» s’affrontent jusqu’à la réconcilia-
tionfinale. Lesspectateursquenousavons interrogés, s’ils
n’ont pas tout suivi précisément, ont néanmoins compris
lesgrandes lignesde l’actionsansseplaindredemigraine.
Ces tentativessont cependant limitéespardes raisons tech-
niques et financières, sans compter d’éventuels risques
d’allergie ou demalaise. Cependant, vu l’effervescence
actuelle, onpeut s’attendre, si des dispositifs bonmarché
et dequalité émergent, à undéveloppement rapidede la
dimensionolfactivedans lesartsvivants, etpourquoi pasun
téléphoneolfactif
(10)
qui permettrait d’envoyer àsesamis
des selfiesparfumés.
R
éférences
(1) Hohenadel,K. (2013)TheFirst-EverFireworksShowYouCan
TasteandSmell. Sur lesiteSlate.com:
/
blogs/the_eye/2013/12/27/london_new_years_eve_2013_
bompas_parr_design_the_world_s_first_edible_scented.html.
(2) Corbin,A. (1982)Lemiasmeet la jonquille.Flammarion,Paris,
collection«Champs», 342p.
(3) Canac, P. (2012) Le nez, ouverture à la vie : expériencede
terrain. In «Odorat et goût. De la neurobiologie des sens
chimiquesauxapplications». Ed. Salesse,R. etGervais,R.,
ÉditionsQuae (Versailles-Paris), p499-503.
(4) Herz,R. (2009) International Journal of Neuroscience, 119,2,
263-290.
(5) Williams,H. etPembroke,A. (1989)Lancet, 333, 8640,p734.
(6) Marchal, S. et al.(2016) PlosOne, 11, 2, e0146963.
(7) Pajot, E. (2012) In«Odorat et goût. De laneurobiologiedes
senschimiquesauxapplications».Ed.Salesse,R.etGervais,
R., ÉditionsQuae (Versailles-Paris), p401-411
(8) Park, T.H. (2014) Bioelectronic Nose. Integration of
biotechnology and nanotechnology. Springer (Heidelberg,
NewYork, London), 290p.
(9) Paquet, D. (2004) La dimension olfactive dans le théâtre
contemporain. L’Harmattan, Paris.
(10) Edwards; D. (2013) Ophone and the virtual coffee. Le
Laboratoire, Paris, du17/05/2013au15/09/2013.
ristiquedumélangeà identifier, si bienqu’onpeutdistinguer
un lait deplained’un lait demontagne,maisaussi identifier
unepathologie, de façonnon invasive, àpartir de l’haleine,
de la sueur oudesurinesd’unmalade.
Les «derniers-nez» s’appellent «nez bioélectroniques».
Cette fois, desmicro-électrodes sont recouvertes de ré-
cepteurs olfactifs (fig. 1). Ces dispositifs seraient à la fois
hautement spécifiques et très bonmarché, connectés et
éventuellement implantables, cequi permettrait non seule-
ment le suivi despatientsmais aussi laprévention. Initiées
enEurope, ces recherchessont activement poursuiviesen
Corée
(8)
.
Arts
En art, onpensed’abord à laparfumerie, puis éventuelle-
ment à lagastronomieet à l’œnologie.Mais lesartsvivants
et plastiquesne sont pasen reste.
Lorsde l’exposition«BelleHaleine»en2015auMuséeTin-
guelyàBâle
5
, onapu respirer dupapier peint à l’odeur de
peurhumaine,proposéparSissel Tolaas,uneparfumeusequi
n’enestpasàsoncoupd’essai.ErnestoNeto, unplasticien
brésilien,proposedepuisquelquesannéesdes installations
monumentalesoùdessortesdebaspendantduplafond,et/
oudessacsde toileausol, contiennent desépicesaroma-
tiqueset colorés: onévolueà traverscesœuvresensentant
lechangementd’odeurappariéauchangementdecouleur.
Un jeuneplasticien français, BorisRaux, pleind’inventivité,
propose les portraits olfactifs de ses amismontrant leurs
produitsde toilette sur uneétagère, ouencoreunepiscine
deSoupline, oubien un véritable escalier, mais réalisé en
savondeMarseille
6
.
L’odorisationdesartsde la scène remonte sansdouteaux
anciensGrecs
(9)
mais le20
e
siècleaconnuquelques ten-
tatives que je ne peux toutes recenser ici. En 1952, Yuri
Gutsatz, à lademandedeSerge Lifar, conçut trois odeurs
pour Les IndesGalantesdeRameauà l’OpéradeParis. La
compagnie«Royal deLuxe»odorise sesdéfilésdans les
rues deNantes. Au 21
e
siècle, lacompagnie «Le TIR et la
Lyre»proposedes visites olfactivesde lieuxpatrimoniaux
et trois pièces où les fragrances sont intégrées au scéna-
rio. Une de ces pièces s’est même révélée prémonitoire.
4
GC-MS:gaschromatography-massspectrometry.Cesappareils
séparent (GC) et identifient (MS) les composés chimiquesvolatils
issusd'unematièrepremièreoud'unproduit.
5
ht tp://t ingue ly. ch/fr/ausste l lungen_events/
ausstellungen/2015/6Belle-Haleine.html
6
Figure1 -
Le«nezbioélectronique»
conçuparunconsortiumde laboratoires
européensdans lecadreduprojet
«Spot-Nosed» (2006).L’électrode
recouvertederécepteursolfactifsest
logéedans leboîtierblancaupremier
plan.
Àgauche
(coffretnoir, façade
blanche), ledispositif électroniquede
préamplificationetderrière, l’ordinateur
qui traite les signaux (photoLaboratoire
deNeurobiologiede l’Olfaction, INRA,
Jouy-en-Josas).
Figure2
«
LesParfumsde
l'âme
»
, unepièce
odoriséedeViolaine
deCarné (compagnie
LeTIRet laLyre).
Scènefinale: le
testamentolfactif
(photoMiSa).
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