La Lettre 51 - page 37

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Jusqu’à lafindesannées80, lesméthodesde traçagedes
connexionscérébralesnepermettaientqu’unciblagepartiel.
Citons lesméthodes de coloration de lamyéline au bleu
luxol oude suivi des voies par injection focalede traceurs
antérogrades ou rétrogrades à l’instar dumanganèse
(3)
.
Ces2méthodes relèventdes techniquesd’histologie, et ne
permettentdoncqu’uneexplorationpartielledes faisceaux
defibresde lasubstanceblanche.Uneméthodealternative
dedissection, développée en 1935par Ludwig et Klinger
(4)
, consiste à procéder à une congélation préalable du
tissu cérébral à une températurede -18°C. Leprocessus
de congélation s’accompagne de la création de cristaux
qui dilacèrent lesfibres, facilitant ainsi leurdissectionaprès
décongélation. Là encore, cette technique est cantonnée
auxétudes
ex vivo
.
Aumilieudesannées80,DenisLeBihan,médecin radiologue
de formation, réalisesa thèsedesciencessur leplateaude
Saclay au seinde l’EcolePolytechniquedeParis, et s’inté-
resse à ce qui, à l’époque, était considéré par les physi-
ciensdéveloppant les techniquesd’imageriepar résonance
magnétiquecommeunartéfact d’imagerie.
Aumilieu des années 1990, l’IRMdu processus de diffu-
sion (ou IRMd) révolutionna laneuroanatomieenpermettant
enfindecartographier
invivo
lesconnexionscérébrales.Elle
rested’ailleursàce jour l’uniqueméthoded’investigation
in
vivo
du connectome structurel, terminologieproposée en
2005par Sporn et Hagmann
(5)
pour nommer l’ensemble
des connexions anatomiques, indissociable du connec-
tome fonctionnel représentant, quant à lui, l’ensembledes
connexions fonctionnelles (
ie
desairess’activant simultané-
ment en réseau).Cette révolutionnécessite toutefoisd’être
validée et plusieurs approches
post-mortem
ou reposant
sur laconceptionde fantômesphysiquessemblablesàdes
faisceaux de fibres, ont étédéveloppées dans cet objec-
tif. La technique FibraScan
(6)
, proposée par l’équipe du
Pr ChristopheDestrieux de l’Unité Imagerie et Cerveau In-
serm/UFRMédecinede l’Université François-Rabelais de
Tours combinedissectiondeKlinger et acquisitionà l’aide
d’un scanner laser de lapièce en cours dedissection, qui
permet
infine
une reconstruction tridimensionnelledu fais-
ceaudisséqué.Une techniquealternatived’imagerieoptique
ditePLI (pourPolarizedLight Imaging)aétédéveloppéepar
l’équipeduDrMarkusAxer de l’Institut deNeurosciences
et deMédecine (INM1) du Forschungszentrum Jülich en
Allemagne
(7)
.Cette techniqueexploite labiréfringencede la
gainedemyélinesoumiseàunesourcede lumièrepolarisée
pour induireuncontrastequi dépendde l’orientation locale
desaxonesmyélinisésvis-à-visde ladirectionde lasource
de lumièrepolarisée.
Observer lemouvement de l’eauà l’aidede l’IRMpour
reconstruire la trajectoiredesaxones
L’IRM a, dans sonprincipe, été conçue en supposant les
molécules d’eau immobiles, ce qui n’est bien sûr pas le
cas. Lemouvement desmolécules d’eau se traduit alors
par un déphasage du signal, qui, s’il est amplifié à l’aide
d’impulsionsdegradient dechampmagnétiqueplutôt que
compensé, peut donner accès au coefficient dediffusion
desmolécules enmouvement. La séquence correspon-
dante appelée «PulsedGradient SpinEcho» (PGSE) fut
développéedans lesannées60parStejskal et Tannerpour
caractériser lecoefficientdediffusiondes liquidesdéfini par
la seconde loi de Fick chez les chimistes. En 1986, Denis
LeBihaneut l’idéed’exploiter ceprincipepourmesurer les
variationsducoefficient dediffusionapparent d’unéchan-
tillondemuscledeporc lors de l’applicationdegradients
pulsésdansdifférentesdirectionsde l’espace, et d’obser-
verque lecoefficient étaitmaximum lorsque ladirectiondu
gradient appliquécorrespondait à ladirectiondesfibresdu
muscle.C’estceprincipequi futensuiteutilisépourcartogra-
phier
in vivo
l’orientation localedes connexions cérébrales
au seinde la substanceblanchecérébrale. En1994, Peter
Figure1
-
Àgauche
, illustrationdumouvementbrowniendespollensdans l’air, considérécommeunmilieudénuéde toute
entrave;
àdroite
, illustrationde l’effetderestriction imposépar lamembraned’unaxonereprésentéeparunegéométrie
cylindrique, sur lesmoléculesd’eaucirculantau seindes tissus ;onnoteuneanisotropiede lamobilitédesmoléculesd’eauqui se
déplacentplus librementdans ladirectionde l’axonequedans touteautredirection ; c’est leprincipeutiliséen IRMdediffusion
pourdétecter ladirection localedesconnexionscérébrales.
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