La Lettre 50 - page 8

La lettre
n°50
istoiredesNeurosciences
sorielle olfactive, comme une image dumonde extérieur
s’inscrit à la surfacede la rétine, ou comme l’image tactile
d’unobjet s’inscrit à lasurfacede lapeau.Seulement,dans
lecasde l’
i
mageolfactive
, lesdeuxdimensionsde lasurface
sensoriellene reproduisentpas lesdimensionsspatialesdu
stimulus
qui nepossèdepasde tellesdimensions. L’image
olfactive n’est pas laprojectionphysiquedumonde olfac-
tif sur l’organe, mais un codagedepositionqui utilise les
dimensions spatiales de l’épithéliumpour représenter des
dimensionsnon spatialesdu stimulant.
Maisàquoi servirait l’imageolfactivepériphériquesi ellene
trouvaitpasquelquecorrespondancedans lesautresétages
dusystèmenerveux?Zwaardemaker avait biencompris le
problème et l’avait résolu en postulant que la surface de
l’épithélium olfactif se trouvait dupliquée à la surface du
bulbeolfactif. Lessitesde terminaisondesaxonesdesneu-
rorécepteurs reproduisaient les relationsspatialesde leurs
cellulesparentesselonunprincipede
somatotopie
dont on
saitqu’il est largement répandudans lesystèmenerveux.Les
données lesplus récentessur l’organisationdesprojections
entre l’épithéliumet lebulbeolfactif confirmentces intuitions.
L’hypothèsechromatographiquede ladiscrimination
desodeurs
Il y avait dans la notion, avancée par Zwaardemaker, de
séparationdesmolécules en fonctionde leurs propriétés
physiquesune idéequidevait suivresonchemin jusquedans
lesannées récentes.Comme lesont nombred’hypothèses
scientifiques, elledevait finalement être abandonnée, non
parce qu’on a démontré qu’elle était fausse, mais parce
qu’une autre hypothèse expliqueplus simplement lephé-
nomène— ladiscriminationdesodeurs—dont ellepréten-
dait rendre compte. La séparationphysiquequepostulait
Zwaardemakeretqu’il attribuait à ladiffusiondesmolécules
dans la fenteolfactive, en fonctionde leurpoidsmoléculaire,
d’autresauteursvont en rendre responsables lespropriétés
d’adsorptiondifférentielledumucusolfactif.C’est la
théorie
chromatographique
de l’olfaction, longtempsdéfendueaux
États-UnisparMaxMozell (1964).
Onnesaitpasquellepart laséparationchromatographique
desmoléculesprenddans ladiscriminationdesodeurs.Ce
que l’onsait,en revanche,maintenant,c’estquecetteanalyse
physique ne jouepas un rôle essentiel puisqu’il existe un
grandnombrede récepteursmoléculairesdont la fonction
est précisément ladiscriminationdesodeurs.
L’entréeenscènede l’électrophysiologie
Sipénétrantesqu’aientété lesvuesdeschercheursdudébut
dusièclesur le fonctionnementdusystèmeolfactif, ellesne
pouvaient s’imposer en l’absencededonnéesdirectes sur
laphysiologiede l’organeolfactif etdesesvoiesnerveuses.
Comme pour les autres systèmes sensoriels, ce sont les
phénomènesélectriquesqui vont fournir lespremiers indices
d’activitédu systèmeolfactif.
Aumoment oùZwaardemaker écrivait L’
Odorat
, la nature
électrique de l’influx conduit par le nerf avait été depuis
L’intuitionde lachimiotopieet de la représentation
spatialede l’odeur
Endépit de la raretédes données physiologiques dispo-
nibles sur le système olfactif périphérique au début du
XX
e
siècle, l’ouvragedeZwaardemakercomporteauchapitre
des
énergiesspécifiquesdesodeurs
l’exposédétailléd’une
hypothèse sur son fonctionnement.
L’hypothèsedeZwaardemaker est que lesénergies spéci-
fiques corrélatives des classes d’odeurs et qui expliquent
adaptationcroiséeet anosmiespartielles sont portéespar
des catégories correspondantes de cellules réceptrices.
CequeproposeZwaardemakern’estpasautrechoseque la
notionde
chimiotopie
, elle-mêmeapparentéeétroitement à
Figure3 -
Schémade ladivisionhypothétiquedesqualités
dans la régionolfactive.
«Leschiffresromainsont rapportaux
énergiesqui, correspondantauxneuf classesd’odeurs, sont
supposéesplacéesenzonesverticales, leschiffresarabesdonnent
lasuitedeséchelonsdans lessérieshomologues.Laflèche indique
ladirectionde l’inspiration (d’aprèsZwaardemaker, 1925).
cellede
codagespatial
de l’odeur.Peut-on trouvermeilleure
évocationdu codage spatial des odeurs que ces lignes :
«Lamuqueuseest croiséede traitshorizontauxet verticaux
qui déterminent, pour chaqueélément, nonpasseulement
saplacemais lestimulant olfactif auquel il estplussensible
qu’auxautres. Il enestdecettemosaïquecommed’unsys-
tème de coordonnées : chaque énergie particulière a sa
placedéterminée. » Il suffitausystèmenerveuxde repérer la
zonede lamuqueuseolfactived’où lui parvient unmessage
pour connaîtrequelleénergie spécifiqueaétémiseen jeu
par le
stimulus
et doncquel est ce
stimulus
(figure3).
L’odeur s’inscrit doncmatériellement dans la surface sen-
1,2,3,4,5,6,7 9,10,11,12,13,14,15,16,17,18,...41
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