La Lettre 49 - page 28

La lettre
n°49
régulateurs au seindes réseaux neuronaux et provoquant
ainsi les troublesneurologiquesetpsychiatriquesobservés
chez lespatients.
Anticorpsdirigéscontre les récepteursAMPA
Les récepteurs glutamatergiques sensibles à l’acide
α
-amino-3-hydroxy-5-méthyl-4-isoxazolepropionique (AM-
PAR) sont, avec les NMDAR, les principaux récepteurs
ionotropiques au glutamate du SNC et agissent comme
des canaux ioniquesperméables aux cations. Ils sont res-
ponsablesde ladépolarisationprimairedesneuronesaprès
stimulation glutamatergique, et lesmodifications de leur
niveau de phosphorylation et de leur distribution synap-
tique sous-tendent lesmécanismesmajeurs deplasticité
synaptiquequesont laLTPet laLTD.Quatresous-unitéssont
connues (GluA1-4) qui s’assemblent en hétérotétramères
pour former un récepteur fonctionnel
(4)
.
Desanticorpsdirigéscontre lesAMPARont étémisenévi-
dence chez des patients souffrant d’encéphalite auto-im-
mune. Le tableaucliniqueestdifférentdespatientsprésen-
tant des anti-NMDAR et la fréquencede ces encéphalites
bienmoindre.Deuxà troispatientssont actuellement iden-
tifiéspar anenFrance. L’âgedesurvenueet l’associationà
descancersest variabledanscetteencéphaliteauto-immune
rare,dont laprésentationcliniqueesthétérogène,maisasso-
ciegénéralementuneconfusion,des troublespsychiatriques
et demémoire, ainsi quedescrisesd’épilepsie temporale.
L’applicationdesanticorpsdepatientssurdesneuroneship-
pocampiquesencultureentraîne ladiminutionde ladensité
post-synaptiqueenAMPARde façon spécifique, dose-dé-
pendanteet réversible.Cettediminutionde l’expressionde
surfacedesAMPARest liéeàuneaugmentation rapidede
l’internalisationdeces récepteurssuiviede leurdégradation
dans les lysosomes. Dans cemodèle, l’internalisationdes
AMPAR s’accompagnait d’unedécroissancedes courants
AMPA, sansaltérationdescourantsNMDA,d’unediminution
compensatricedu tonus inhibiteur GABAergique et d’une
augmentationglobalede l’excitabiliténeuronale. Ainsi, ces
donnéesconfortent l’hypothèsed’un rôlepathologiquedirect
desanticorpsanti-AMPAR,bienque lesconséquences fonc-
tionnellesà l’échelledes réseauxneuronauxchez l’homme
restent largement inconnues.
Anticorpsdirigéscontre les récepteursmGluR1
Le récepteur métabotropique au glutamate de type 1
(mGluR1), est exprimé de façon diffuse au sein du SNC.
Dans lecervelet, il estessentiellementexprimésur leversant
post-synaptiquedu soma et des épines dendritiques des
cellulesdePurkinje, auniveaudessynapsesavec lesfibres
parallèles issuesdescellulesgranulaires
(5)
.
Enfin, l’injection intrathécalede ces anticorps
chez la souris reproduit l’ataxie cérébelleuse
observée chez les patients
L’activationdemGluR1 aboutit à l’activationdedeux voies
de signalisation intracellulaires. Lapremière voie est mise
en jeu lors de la survenue concomitante d’une dépolari-
dont le rôleest central dans lesphénomènesdepotentiation
etdedépressionà long terme (LTP,LTD)
(2)
.LeNMDAR joue
doncun rôle fondamentaldans lesmécanismesdeplasticité
synaptiquequi sous-tendentdesprocessusphysiologiques
telsque lamémoireet lesautres fonctionscognitives.
Les auto-anticorps dirigés contre leNMDAR s’associent
spécifiquement àun tableau très stéréotypéd’encéphalite
auto-immune
(3)
.Lesencéphalitesàanti-NMDARsurviennent
préférentiellement chez des femmes jeunes et sont asso-
ciées à un tératome ovariendans 60%des cas. L’atteinte
clinique associe prodromes infectieux, symptomatologie
psychiatrique d’installation subaiguë, mouvements anor-
maux impliquantnotamment lasphèreoro-faciale,épilepsie,
dysautonomie, troublesde lavigilanceetdépression respira-
toired’origineneurologiquecentrale.Si ce tableaupeut être
trèssévère, une récupérationprogressiveestgénéralement
observée sous traitement immunomodulateur et 90%des
patientssont guérisdeuxansaprès ledébut de lamaladie.
Actuellement, unequarantainedepatients sont diagnosti-
quéspar anenFrance.
In vitro
, l’application de ces anticorps sur des neurones
hippocampiquesmurins en culture aboutit à l’abrogation
spécifiquedescourantsNMDA
(3)
. Il n’yapasd’argument
pourune inhibitiondirectedes fonctionsdu récepteur, alors
qu’onobserveunediminutionquantitativede l’expressiondu
récepteur à lasurfacepost-synaptique, tant
invitro
surdes
neuronesencultureque
invivo
après injection intra-hippo-
campiquechez le rat d’anticorpsdepatients et qu’au sein
deshippocampesdespatientsautopsiés.Cettediminution
de ladensitépost-synaptiqueduNMDARest réversibleaprès
l’éliminationde l’anticorps,estdose-dépendanteetest liéeà
l’internalisationdescomplexesanticorps-NMDARauseindes
endolysosomessuiteaucross-linkingdes récepteurspar les
anticorpsdivalents
(3)
.D’autrepart, lafixationde l’anticorps
sur leNMDARperturbesafixationà laprotéinepost-synap-
tiqueEphB2,cequi favorise lamobilisationdu récepteurvers
les régions extra-synaptiques, où a lieupréférentiellement
son internalisation, audétriment de la régionpost-synap-
tique, où il exerceson rôle fonctionnel. L’internalisationdes
NMDAR semble avoir des conséquences complexes sur
les réseaux neuronaux. Ainsi, l’applicationd’anticorps de
patients sur unmodèlede réseauneuronal cortical
in vitro
fait décroître la fréquencedespointes et décharges spon-
tanées tandis quepersiste une activité rythmique au sein
deces réseaux.
Invivo
, l’infusion intra-ventriculairedeLCR
oud’anticorps purifiés depatients anti-NMDAR chez le rat
aboutit à un état d’hyperexcitabilitédu cortexmoteur et à
un excès de glutamate extracellulaire qui semblent liés à
l’altérationde laLTDet/ouà la réductiondesNMDARsur les
neuronesGABAergiques. Enfin, il aété récemmentmontré
que l’infusionprolongéeduLCRdespatientsdans lesven-
triculescérébrauxdesouris induisait chezcesanimauxdes
troublesmnésiquesetdesmodificationscomportementales
de type dépressif. L’ensemble de ces données suggère
doncque lesauto-anticorpsanti-NMDARsont capablesde
moduler lamobilitéet le recyclagedesNMDARà lasurface
neuronale, aboutissant àdesperturbationsdemécanismes
ouveautés enneurosciences
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