La Lettre 48 - page 26

LA LETTRE
N°48
ouveautésenneurosciences
et l’épigénomiqueassociéesà lamémoireet auxmaladies
neurodégénératives. Si les données actuelles suggèrent
que la régulationde l’expressiondesgènes
via
l’acétylation/
méthylationdes histones et laméthylationde l’ADN jouent
un rôle important,desdonnéesdécisivesmanquent encore.
Dans lesétudes futures, ildevient indispensabled’approcher
cesquestions, et notamment depréciser lladistributionde
cesmodifications sur le génome ainsi que des enzymes
épigénétiques associés telsque lesHATset lesHDACsou
d’autres régulateursde lachromatine, par des techniques,
comme le «ChIP-sequencing »qui permettent d’analyser
l’ensembledugénome, afindecorréler cesdonnées avec
l’expressiondesgènes.
Certaines étudesmontrent que l’expression basale des
gènes ou les dérégulations génétiques associées à une
maladiechangent avec lestatut chromatinien,maiscen’est
pas toujours le cas. Un exemple de cette association est
l’étude récentede l’équipeduDr. Fraenkel, réaliséeàpartir
ducerveaudesourismodèlesde lamaladiedeHuntington,
montrantque lesgènesdont l’expressionestdiminuéepar la
mutationHuntingtonpossèdent unesignatureépigénétique
spécifique. Ces gènes présentent unprofil deméthylation
de l’histoneH3 (H3K4me3) remarquableauniveaude leur
promoteur, car large et couvrant unepartiedu corps des
gènes
(12)
.Uneétude récentemenéedansnotre laboratoire
précisece résultatenmontrantque laplupartdesgènesdont
l’expressionestdiminuéedans lamaladiedeHuntingtonsont
sous le contrôlede très larges « enhancers » (régions du
génomeàdistancedespromoteurs)appeléssuper-enhan-
cers
(13)
,etqu’ils régulentdesgènesqui à la foisdéfinissent
l’identitéet permettent d’assurer la fonctionneuronale
(14)
.
Ainsi, nombre de ces gènes contrôlent lesmécanismes
associésà laplasticitésynaptique.Nos résultatssuggèrent
également que la diminution d’expression de ces gènes
résulted’unebaissespécifiquede l’acétylationde l’histone
H3 (H3K27ac)auniveaudessuper-enhancers. Ilestclairque
cesdécouvertesouvrentdesperspectivesnouvelles tant sur
leplande lacompréhensiondesmécanismesneuro-épigé-
nétiques fondamentaux,quesur leplandudéveloppement
de thérapies innovantes.Agir sur lesenzymes responsables
de ladéméthylationdeH3K4oude l’acétylationdeH3K27
pourrait êtreuneoption thérapeutique
(12, 14)
.Parailleurs,
lesgroupesdeLi-Huei Tsai etManolisKellisont récemment
caractérisédes signatures épigénétiques dans lamaladie
d’Alzheimer en étudiant l’hippocampede sourismodèles
de la pathologie
(15)
. Ils identifient certaines signatures
moléculaires (liées à laplasticité neuronale et au système
immunitaire)associéesavec laprogressionde lapathologie,
bien conservées entre les patients atteints de lamaladie
d’Alzheimeret lasourismodèle.Cetteétudes’inscritdans le
cadred’unevasteétude lancéeen2006 (programmeEpige-
nomics) et dans laquelle lapremièrecartede l’épigénome
de cellules humaines incluant 111 épigénomes différents
vientd’êtrepubliée (numérospécial de la revueNaturesorti
le18 février2015 ;RoadmapEpigenomicsConsortium)
(16)
LES MÉTHODES DE SÉQUENÇAGE
À HAUT DÉBIT
La technique d’immuno-précipitation de la chromatine
(ChIP) est laméthode laplus directepour localiser des
modificationsd’histonesoudes facteursde transcription
sur l’ADN.Combinéeàunséquençagehaut-débit (ChIP-
seq)permettant uneanalysede lachromatineà l’échelle
dugénome, cette techniquehautement résolutive,qui ne
cessed’êtreperfectionnée, est devenue une référence
pour l’étude desmécanismes épigénétiques. Le prin-
cipede laméthodeest d’enrichir l’échantillondedépart
(cellules ou tissus) en fragments d’ADN associés à une
modificationd’histoneouàuneprotéined’intérêt, à l’aide
d’uneétapedeprécipitationutilisant unanticorpsdont la
qualité est cruciale. Les fragments d’ADN enrichis sont
ensuiteséquencésdemanièresystématique.Différentes
méthodes de séquençage ont étédéveloppées, mais la
plateformemise aupoint par Illumina (IlluminaGenome
Analyzer)est laplus répandue.Desoutilsbio-informatiques
performantssontnécessairespouranalysercesdonnées,
qui représentent rapidement degros volumes. Ainsi, les
questions de stockage et d’analyse des données sont
centrales.Lesséquencesobtenuesàpartirdes fragments
d’ADNenrichis (engénérald’une longueurde50pairesde
bases) sont assembléesà l’aidedeprogrammescomme
BOWTIEafinde reconstituer legénome.Desprogrammes
appelés «peak callers»permettent ensuited’identifier
les régionsdugénome significativement enrichies, c’est
àdire celles qui lient effectivement l’histonemodifiéeou
laprotéine (facteur de transcription, co-activateur, etc...)
testée. Des outils complémentaires offrent lapossibilité
d’effectuer desanalysesdifférentiellesafindecomparer
des conditions différentes (pathologique et contrôlepar
exemple), d’annoter les régions du génome enrichies
(quels gènes sont enrichis ? lamodification d’histone/
protéined’intérêt est-elleprésenteauniveaudespromo-
teurs ou àdistancedes promoteurs ?) et d’identifier au
niveaudeces régionsdessitesde liaisonàdes facteurs
de transcription, pour ne citer quequelques exemples.
L’analysede ces régions enrichies dans leur ensemble
permet ainsi d’identifier si la condition étudiéeprésente
une signature particulière. Enfin, l’analyse de données
ChIP-seqnécessite ledéveloppement deméthodessta-
tistiqueset denormalisations sophistiquées. Lecoût, s’il
resteencoreélevé,diminue régulièrement.Celas’accom-
pagned’uneutilisationcroissantede la techniquepar la
communauté scientifique et il est clair que le recours à
cetteméthode,quoiqu’encore restreintedans ledomaine
desmaladiesneurodégénératives,devraitpermettredes
avancées significatives. Enparticulier, l’identificationde
signaturesépigénétiquesassociéesàcesmaladiessera
unatoutpour ledéveloppementdenouvelles thérapie
s
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