La Lettre 53 - page 34

LA LETTRE
N°53
ossier
quelquesétudesàce jouront testé leseffetsde laSCPpour
le traitementdesaddictionsenpremière indication. Lacible
est toujours leNAc et sa région et les résultats, bien que
positifs à court terme pour l’addiction à l’héroïne, l’alcool
ou à la cocaïne
(2)
, n’ont pas été suffisamment spectacu-
laires pour susciter un engouement tel que celui pour la
maladiedeParkinson. Il est doncdifficilepour lesgroupes
cliniquesde recruter despatients volontaires. Si le succès
estmitigé, il est peut-êtreenpartiedûauchoixde lacible.
Bienentendu, associer leNAcaux troublesde lamotivation
est naturel de par sa position critique dans le circuit de
la récompense. Néanmoins, nos travaux suggèrent que le
NST pourrait représenter une cible bien plus pertinente.
En effet, alors que lamanipulation du NAc a toutes les
chancesd’entraînerdes troublesde lamotivationpour toute
formede récompense, d’activité, il n’en est pas demême
pour leNST. Nous avons en effet montré chez le rat que la
SCPàhaute fréquence,duNSTpeutdiminuer lamotivation
desanimauxà fourniruneffortpourobtenir lacocaïne, sans
pour autant réduirecellepour une récompensealimentaire
sucrée
(3)
. Cesdonnéesont été renforcéespar l’utilisation
demodèlesanimauxvisant àmimer lescritèresde l’addic-
tion (pertedecontrôle sur laconsommationet persistance
de la recherche/consommationmalgré les conséquences
négatives).Nousavonseffectivementmontréque la lésion,
comme laSCPàhaute fréquence,duNSTempêche laperte
decontrôle sur laconsommationdecocaïneoud’alcool et
peut restaurer unniveaudeconsommationcontrôléechez
des individusayantperdu lecontrôlede leurconsommation
d’alcool
(4)
, d’héroïne
(5)
oudecocaïne.
Même si les données obtenues chez l’animal sont encou-
rageantes, il n’y a, à ce jour, que des données cliniques
obtenueschez lespatientsparkinsoniensdépendantsà leur
traitement dopaminergique (i.e. la L-DOPA ; syndromede
dérégulationdopaminergiqueouDDS). Chez des patients
DDS, laSCPàhaute fréquenceduNSTamontrédeseffets
bénéfiques sur les comportements addictifs. Ces résultats
sont plutôt positifset suggèrent que leNSTpourrait effecti-
vement représenterunecibledechoixpour le traitementdes
addictions. Il faudra toutefoissurveillerdeprès les troubles
possiblessur l’humeuret lesémotionsengénéral puisqu’il a
étémontréque l’inactivationduNSTpar lésionchez l’animal
ouSCPchez lepatient parkinsonien
(6)
peut conduireàun
émoussement affectif. Il est importantdenoterqued’autres
ciblescérébralessont étudiéesdans lecontextedesaddic-
tions, tellesque l’insulaou lecortexpréfrontal.
Au-delàdes troubles associés à un tel traitement, laSCP
pose leproblèmedesonaspect invasif. Il est intéressantde
noter quedenouvelles techniquespermettent d’envisager
la possibilité d’appliquer une SCP non invasive résultant
d’interférence temporelle entredeux courants électriques
oscillatoiresappliquésà trèshaute fréquenceetqui permet-
traitdemodifier l’activitéd’unestructurecérébraleprofonde
sans agir sur les couches corticales situées au-dessus de
cettestructure. Lamiseaupoint aété réaliséeauniveaude
l’hippocampe
(7)
.
LES NOUVELLES STRATÉGIES THÉRAPEU-
TIQUES CONTRE LES ADDICTIONS
CHRISTELLE BAUNEZ ET MICKAËL DEGOULET
(Institut desNeurosciencesde laTimoneUMR7289CNRS
&AixMarseilleUniversité)
Les stratégies thérapeutiques contre les addictions ont
jusqu’à ce jour essentiellement porté sur des traitements
pharmacologiqueset les thérapiescomportementales, sans
succèssystématique.Onentendparlercesdernièresannées
destratégiesalternatives tellesquechirurgicales,maisaussi
moins invasives.Quellessont-elles?Quelpotentiel thérapeu-
tiqueprésentent-elles réellement ?Oùenest-on?Cettemini-
revuenonexhaustive seproposed’aborder cesquestions.
Lesstratégies invasivesutilisant lachirurgie intracé-
rébrale
Les lésions
Sans revenir aux années 70 des cingulotomies et autres
lésions cérébrales ayant conduit àde nombreux effets se-
condaires qui ont traumatisé des générations, nous nous
contenterons ici de relater les données plus récentes qui
pourraient également être associées à desméthodes lé-
sionnelles plus contrôlées. Audébut des années 2000, de
nombreuses lésions du noyau accumbens (NAc) ont été
réalisées enChine sur des sujets dépendants, surtout à
l’héroïne. Les résultats rapportésétaientpositifspar rapport
à ladépendanceà la substance,maisdenombreux effets
secondaires ont conduit à interdire cette prescription. Si
lacibleet laméthodepeuvent être remises encause, il ne
faut pasnécessairement fermer laportedéfinitivement à la
possibilitéde lésionpeut-êtremieuxciblées, versuneautre
régioncérébrale, telleque lenoyausubthalamique (NST)et
qui pourrait éventuellement être réaliséepar gamma-knife
(unappareil à rayonsgammapermettantd’opérer lecerveau
sans l’ouvrir),commec’est lecaspourdespathologies telles
que ladépression résistanteauxmédicamentsou les troubles
obsessionnelscompulsifs (TOCs).
La stimulation cérébraleprofonde (SCP)
Depuis ledéveloppement de la stimulation cérébralepro-
fondeappliquéeauniveauduNSTpour le traitement de la
maladiedeParkinson
(1)
, denombreusesapplicationsont
suivi,quecesoitdans lecadredemaladiesneurologiques,
mais également demaladies psychiatriques telles que les
TOCs ou lesdépressions résistantes aux traitementsphar-
macologiques
(2)
. La cible cérébrale varie d’une patho-
logie à l’autre. Pour ce qui concerne les addictions, des
observations cliniques ont rapporté un effet bénéfiquede
la SCP duNAc (ou plus largement de la région duNAc
incluant unepartiede lacapsule interne)chezdespatients
atteintsde syndromedeGillesde laTouretteet qui avaient
des problèmes d’alcoolisme oude tabagisme. Seulement
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