La Lettre 53 - page 5

fonctionnement de la région sous-thalamiqueauniveaude
la substance noire (
substantia nigra ou locus niger
), une
structurecentraleducerveau. Pour ce faire, il se fonde sur
uneobservationduneurologue françaisPaul Blocq (1860-
1896) et d’unélève roumainenstagechezCharcot,Gheor-
gheMarinescu (1863-1938),montrantquedes tremblements
de typeparkinsoniensont liésàune tumeurdanscettepartie
ducerveau. Leglobuspallidus (oupallidum) et le striatum
seront ensuitemisencause.
En1912, leneuroanatomisteetpsychiatreallemandFrederic
Lewydécrit les«inclusions» (ouamas)spécifiquesde lama-
ladiedeParkinsondans lesneuronesde lasubstancenoire;
ce sont les corps de Lewy. Puis le neurologuebritannique
SamuelKinnierWilson introduit le termed’«extrapyramidal»
pour présenter les symptômes de lamaladie, notamment
la rigidité.
Pendant quelques années, lamaladie de Parkinson est
ensuite remise enquestion, en tant qu’entité autonome, à
causede l’épidémied’encéphalite léthargique (une infec-
tioncérébrale virale) qui sepropageenEuropeentre1915
et 1926. Les symptômes de cette infection ressemblent à
ceuxde lamaladiedeParkinson.Maisau termed’unehis-
toirecomplexe, notammentgrâceà la thèsededoctoratdu
neuropathologiste russeKonstantin Tretiakoff publiée en
1919, lamaladie est définitivement reconnue comme une
dégénérescencedesnoyauxgriscentrauxounoyauxbasaux
(striatum et substance noire). Un dysfonctionnement des
neuronesdecesnoyauxentraînerait rigiditéet tremblements.
Errements thérapeutiques
Telle est donc la situation dans les années 1950. Aucun
traitementde lamaladiedeParkinsonn’est alorsdisponible.
Dans les années 1930, on réalise les premières tentatives
deneurochirurgie, l’objectif étant desupprimer l’influxner-
veux entre lecortex et lamoelleépinière (le faisceaupyra-
midal). Ce n’est pas concluant. Puis apparaît la chirurgie
stéréotaxique :undispositif mécaniqueest fixésur la têtedu
patient et desguidessolidairesdecedispositif permettent
auxchirurgiensde léser des régionsprécisesducerveau,
notamment lesnoyauxgriscentraux. Les résultats thérapeu-
tiques ne sont pas satisfaisants, mais on comprendmieux
comment fonctionnent cesnoyaux.
À l’époque, les traitements reposent sur desméthodes
empiriques. En son temps, Parkinson avait préconisédes
saignéesdécongestionnantesà labaseducouou lesmédi-
camentspurgatifs.Onessaieensuite touteunepanopliede
substances : sulfatede fer, chloruredebaryum, bromures,
barbituriques, chanvre indien, extraits thyroïdiens, etc.Sans
bénéficenotablepour lemalade.
En 1930, à Berlin, lemédecin allemand Heinrich Rosin
(1863-1934) utilise des extraits de ganglions de la base
bovins pour tenter de soigner les patients. Il espère ainsi
compenser ledysfonctionnementdesganglionsde labase
desmalades.Maisc’est unnouvel échec. Lesextraitscéré-
brauxdesubstitution restent toutefois le traitementprivilégié
desmaladies nerveuses durant toute la premièremoitié
duXX
e
siècle. Précédemment, leprincipal progrès théra-
UN PARKINSON PEUT EN CACHER UN AUTRE
| PAR STÉPHANE GAILLARD
Lorsque le très intéressant
ar ticle de Jean-Claude
Dupont sur l’histoire de la
maladie de Parkinson est
parvenu à la rédaction
de La Lettre, nous avons
cherché à l’illustrer par un
portrait de JamesParkinson.
En utilisant les mots clés
« JamesParkinson»et « image»
sur unmoteur de recherche,
près d’une -centaine de sites proposent un portrait de Par-
kinson, certains de ces sites étant directement consacrés
à lamaladiedeParkinson. Ceportrait est celui d’un homme
robuste, brun et dotéd’unebarbe fournie (photo ci-dessus).
En observant les détails de cette image, on peut se rendre
compte assez rapidement qu’il ne s’agit pas d’undessin, ni
d’unepeinture,maisbiend’unephotographiedans l’espritdes
daguerréotypes. Unequestion sepose alors : comment une
photographie de James Parkinson, mort en 1824, pourrait-
elleexister alorsque lapremièrephotographieofficiellement
connue, prisepar NicéphoreNiépcedepuis la fenêtrede sa
maison, est datéede1826? Il ne fait aucundouteque leper-
sonnageà labarbe fourniedeceportraitque l’onpeut trouver
sur internet n’estpasJamesParkinson !Maisalors,qui est-il  ?
Enpoursuivant nos recherchesnousavonsconstatéquenous
n’étionspas lespremiersànousposercesquestions
(1, 2)
.Et
nous avons constatéque la réponseàcetteénigmeavait été
trouvée
(2,3)
. Lepersonnage représenté sur cettephoto est
JamesCumineParkinson (1832-1887),unaspirantde lamarine
ayant fait carrièreenAustralie,NouvelleZélandeet Tasmanie,
dontonpeut trouver labiographieetd’autresphotossur lesite :
UnParkinsonpeutencacherunautre…Ànotreconnaissance,
il n’existeaucunportrait de l’auteurde«Anessayon thesha-
kingpalsy».
Cette étrange énigme n’est pas sans rappeler une ancienne
et humoristique controverse selon laquelle ce ne serait pas
Shakespearequi auraitécrit«Hamlet »maisun illustre inconnu
qui s’appelait aussiWilliamShakespeare…
(1)M. Lawden, Practical Neurology 2011;11:316. doi:10.1136/
practneurol-2011-000093
(2)https://searching4james.wordpress.com/tag/james-parkinson/page/2/
(3)Stott SRW. PractNeurol 2015;0:1. doi:10.1136/practneurol-2014-001043
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