La Lettre 50 - page 36

La lettre
n°50
ribune libre
par tous les patients, apu ainsi progresser vers lepropre
brasparalysédupatient réactivépar unedérivationneuro-
nale à l’aided’électrodes de surface commandées par le
cerveau
5
. L’imageriementaleet lesalgorithmes traitant les
donnéesélectro-physiologiquesontpermis l’apprentissage
et lapersonnalisationde la technologie. Par cet exemple,
onvoit comment unedémarcheéthiqueet rigoureuse, sans
s’égarerdansdesutopies technologiques, s’impose, etpro-
gressivement apporteauxpatientsunbénéfice indiscutable
pour sonquotidien.
Le transhumanismeestdoncunconcept scientifiquementet
éthiquement erroné
: l’homme librequi pense, aimeet crée
n’estpasunordinateurquibatun joueurdeGo
(ndlr
:allusion
auprogrammed’intelligenceartificielleAlphaGodeGoogle
qui abattu le championdumonde (4 à 1) enMars 2016)
.
Onconfondperformanceet intelligence.LesNeurosciences
nousapprennentque lesconceptionscybernétiquesducer-
veausont erronées, et nousmontrent unevisiondynamique
d’un cerveauqui meurt et se
renouvelleenpermanence.
Labanalisationdes idées
transhumanistes impose
un positionnement
ferme. Il persiste des
interditsd’intervention
sur le vivant dès lors
que les modifications
envisagées remettent en
cause les bases fondamen-
tales de l’humain. C’est ainsi
que le clonage reproductif a
été interdit et que l’expérimen-
tation sur les cellules souches
embryonnaires est encadrée. Les
technologies d’intervention sur le cer-
veau doivent aussi être encadrées du fait de
leur impact majeur sur le vivant. Nous avons la
responsabilitéd’uneanticipationdesconséquences
denos recherchesetde l’intégrationdansnosdémarches
expérimentalesde laquestionéthiqueet sociétale.Surveiller,
rendrecompte,maisnepas interdire.
La recherchedoit rester libre,mais avecuneobligationde
transparenceet en interactionavec les instancesdémocra-
tiquesqui enévaluent lesconséquencesde façonéclairée
et représentent la société.
Deux sanctuaires doivent être respectés, qui sont labase
de ladéfinitionde l’humain : legermenet lapensée incar-
néedans le cerveau.
L’idéologie transhumanistedoit être
combattueet sesconséquencespour l’humain interditesau
même titreque leclonage reproductif
.
L’équité de l’accès à l’innovation technologique doit être
assurée
.Lamarchandisationducorpsdont lesperformances
sontaccruesà façon,amèneaudéveloppementd’unproduit
dont le coût risque de faire l’objet de surenchères. C’est
d’autant plus dommage que lemodèle de l’industrie de
l’électroniquepermet aucontraireunediffusionàbascoût.
La fondationBill Gates défend unmodèlediamétralement
opposé : à l’imagedes communications àbas prix dissé-
minéesà travers les téléphonesportablesdans lespaysen
développement,des technologies innovantessont financées
qui transposent cemodèlepour la santé.
Les hommes doivent mourir et lamédecine consiste aussi
à accompagner lamort
: l’homme est mortel pourmainte-
nir l’intégrité de l’humanité. Le rôle dumédecin est aussi
d’accompagner lamort.
Plusspécifiquement, noussommesconfrontésà laproblé-
matiquede laméthodologiedudéveloppement de l’inno-
vation technologique pour le cerveau
. Dans le cadre du
projet européen « ethentec
4
» (2009-2012) ledébat avait
commencé violemment : lecerveauest un sanctuaireet
on ne saurait y introduiredes technologies
comme la neurostimulation. Après
une visite auCHUdeGrenoble, la
conclusionavaitétéunanime : le
cerveau neurostimulépour
lamaladie de Parkinson
restait unsanctuaire. La
réversibilitédes effets
de la technologieet le
handicap du patient
sont autant d’argu-
mentsconvainquants.
Comment transférer pour la
première foischez l’homme
desnouvelles technologies
utilisant de nouveauxma-
tériaux, des propriétés de
capturede l’informationcéré-
braleetd’interventionassociées?Cetteproblématique renaît
à travers les interfacescerveau-machine.Certainsgroupes
ont empruntédesdémarchessenourrissantd’utopies tech-
nologiques dont on attend toujours lamatérialisation. Le
tétraplégiqueouvrant lacoupedumondede footballdansun
exosquelettecommandépar lecerveau resteunemanifesta-
tionpublicitairedu type« lève-toi etmarche»bienéloignée
de l’indispensable rigueur technologique translationnelle.
Les approches invasives ont mis enplace unedémarche
très spécifique impliquant des équipesmultidisciplinaires
et une validation extensivede labiocompatibilité et de la
fonctionnalité sur les primates. Une démarchemodeste,
étapepar étape, construit une innovationqui répond vrai-
ment au(x) besoin(s) dupatient, lequel est intégrécomme
acteurde la recherche.Lebras robotiséexterne,abandonné
5
Restoringcorticalcontrolof functionalmovement inahumanwith
quadriplegia,CEBoutonetal-Nature2016, 13avril.
1...,26,27,28,29,30,31,32,33,34,35 37,38,39,40,41
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