L’huntingtine : ses liens avec la Maladie de Huntington et ses fonctions cellulaires normales…

La revue écrite par Sandrine Humbert et Frédérique Saudou dans la revue Neuron présente de manière remarquable les principales découvertes de ces dernières années sur l’huntingtine. Ces deux chercheurs INSERM de l’Institut des Neurosciences de Grenoble, pionniers dans la découverte du rôle central de l’huntingtine dans le transport axonal, le contrôle du métabolisme énergétique et la division cellulaire, soulignent combien cette protéine au-delà de son rôle toxique dans la maladie de Huntington est, par sa biologie complexe, au cœur de nombreuses fonctions du système nerveux. Cette somme impressionnante de connaissances laisse entrevoir l’espoir de mieux comprendre la Maladie de Huntington et par la même identifier à terme une stratégie thérapeutique efficace.

La maladie de Huntington est une maladie neurodégénérative héréditaire dominante touchant des individus jeunes (35 ans en moyenne). La maladie de Huntington est une maladie « rare » (prévalence ~1/10000), mais elle représente en France plus de 6000 patients. Elle est caractérisée par trois types de symptômes : des mouvements involontaires (chorée), des déficits cognitifs, et des atteintes psychiatriques associée à une atrophie cérébrale qui touche de manière précoce le striatum. Le décès des patients survient quinze à vingt ans après que les premiers symptômes soient détectés.  Bien qu’un grand nombre de laboratoires et équipes cliniques en France et dans le monde entier, soutenus par les associations de malades et leurs familles, concentrent leurs efforts de recherche sur la maladie de Huntington, il n’existe à l’heure actuelle aucune thérapie pouvant ralentir l’aggravation inexorable de la maladie.

Les principales caractéristiques héréditaires et neurologiques de la maladie ont  été décrites par une jeune médecin, le Dr George Huntington en 1872. C’est plus d’un siècle plus tard, en 1993, que l’anomalie génétique responsable de la maladie de Huntington a été identifiée. Il s’agit d’une expansion anormale de triplet CAG dans la partie codante du gène de la protéine huntingtine. Comment cette mutation pourrait conduire à la dégénérescence des neurones ? Quelles sont les fonctions biologiques de la protéine huntingtine normale ? Quels mécanismes pourraient expliquer que la mutation qui produit une expansion anormale d’un segment polyglutamine dans l’huntingtine, fragilise préférentiellement les neurones du système nerveux ?  Les chercheurs neurobiologistes et cliniciens ont abordé ces questions cruciales depuis plus de vingt ans. Sandrine Humbert et Frédéric Saudou nous rappellent les principales découvertes liées à ces questions.

L’huntingtine peut être considérée comme une protéine d’échafaudage. Elle est exprimée dans tous les types cellulaires. Plusieurs de ses domaines fonctionnels sont retrouvés dans des organismes très anciens au plan phylogénétique. L’huntingtine possède un nombre impressionnant de partenaires protéiques qui agissent dans des fonctions cellulaires diverses. Depuis plus de 15 ans, plusieurs travaux ont montré son rôle anti-apoptotique, en agissant à divers niveaux de la cellule. Les découvertes récentes sur l’huntingtine normale (sauvage) et la forme mutée ont mis en évidence son implication dans la régulation de la transcription, des moteurs moléculaires du transport axonal, des générateurs locaux d’énergie pour le transport des vésicules, de l’endocytose, de l’orientation du faisceau mitotique et de l’autophagie.

Par ses fonctions variées, l’huntingtine interviendrait ainsi dans divers processus neurobiologiques du cerveau adulte mais également pendant le développement et si son rôle dans la maladie de Huntington est certain, elle pourrait également intervenir indirectement dans d’autres pathologies psychiatriques et neurologiques.

S’il n’existe pas encore de traitement pour bloquer ou retarder l’évolution de la maladie de Huntington, la somme impressionnante des connaissances accumulées depuis la découverte du gène, permet de mieux appréhender la complexité de la biologie de l’huntingtine. Améliorer notre compréhension de cette biologie est un axe de recherche crucial  pour à terme découvrir une thérapie efficace pour la maladie de Huntington.

Référence de l’article : Saudou F, Humbert S. The Biology of Huntingtin. Neuron. 2016, 89:910-26. doi: 10.1016/j.neuron.2016.02.003.

Lien vers l’article : Neuron

Contacts:  Frédéric Saudou & Sandrine Humbert – University Grenoble Alpes, Grenoble Institut des Neurosciences, GIN, 38000 Grenoble, France; INSERM, U1216, 38000 Grenoble, France; CHU Grenoble Alpes, 38000 Grenoble, France.

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