L’origine commune des cellules souches et des cellules épendymaires multiciliées

De nouveaux neurones sont générés tout au long de la vie dans le cerveau des mammifères. Les cellules souches à l’origine de ces neurones sont localisées dans des niches neurogéniques à proximité des ventricules latéraux. La compréhension des mécanismes qui régulent la formation de ces cellules est d’un grand intérêt puisqu’elle permettra à la fois d’élucider l’origine de certaines tumeurs, mais aussi d’élaborer des stratégies régénératives à partir de ces cellules souches.

La niche neurogénique adulte est composée de deux types de cellules gliales : les cellules souches astrocytaires qui conservent une capacité proliférative, et les cellules épendymaires multiciliées qui forment une barrière épithéliale entre les cavités ventriculaires et le parenchyme. Ces cellules épendymaires sont post-mitotiques et dotées de nombreux cils motiles, dont les battements coordonnés permettent la diffusion des morphogènes et des facteurs de croissance, et l’élimination des toxines contenus dans le liquide céphalo-rachidien (LCR) et à la surface des parois ventriculaires. Mis à part leur localisation au sein de la niche neurogénique, tout oppose donc ces deux types cellulaires puisqu’elles ne partagent ni leur morphologie, ni leur fonction. De façon surprenante, notre publication récente a permis de révéler qu’elles ont une chose en commun : leur mère !

Par des techniques de traçage génétique à long terme (plusieurs semaines), nous avons suivi des progéniteurs embryonnaires et etudié leurs descendances. La technique Brainbow colore de façon unique un grand nombre de clones qui peuvent être distinguables par l’analyse automatique informatisée des couleurs des cellules de la niche neurogénique. A l’inverse, la technique MADM (Mosaic Analysis of Double Markers) confère à un petit nombre de progéniteurs, la capacité de transmettre les couleurs verte et rouge à chacun de ses lignages fils. Le faible nombre de cellules marquées par la technique MADM permet de suivre sans ambiguité les modes de division (symmétrique ou asymmétrique), le nombre de division, la distance entre les cellules d’un clone, et l’identité des cellules. L’analyse des nombreux clones obtenus grâce à la technique Brainbow permet quant à elle d’obtenir des résultats statistiques robustes. Nos observations montrent que les cellules de la niche neurogénique adulte sont issues de la division asymmétrique d’un progéniteur embryonnaire qui produirait d’abord les cellules souches maintenues à l’état quiescent, puis les cellules épendymaires post-mitotiques. Nous avons de plus montré le rôle déterminant des protéines de la famille Geminin sur la composition des clones et donc sur le destin des progéniteurs embryonnaires. La famille Geminin est composée de 3 membres, connus pour réguler la réplication de l’ADN au cours du cycle cellulaire. GemC1 et MCIDAS, qui participent au complexe de pré-réplication de l’ADN, favorisent la production des cellules épendymaires au détriment des cellules souches adultes. A l’inverse, Geminin, qui inhibe la re-réplication de l’ADN en phase G2 du cycle cellulaire favorise la production des cellules souches adulte par division symmétrique des progéniteurs embryonnaires. Les cascades d’évenements par lesquels les protéines Geminin orientent le destin des progéniteurs sont inconnues et il reste à vérifier si ces facteurs agissent via la réplication de l’ADN et le cycle cellulaire ou de façon indépendante. A terme, ces recherches permettront d’élucider l’origine des cellules souches neurales adultes et de certaines tumeurs cérébrales.

 

Référence :

Ortiz-Álvarez G, Daclin M, Shihavuddin A, Lansade P, Fortoul A, Faucourt M, Clavreul S, Lalioti ME, Taraviras S, Hippenmeyer S, Livet J, Meunier A, Genovesio A, Spassky N. Adult Neural Stem Cells and Multiciliated Ependymal Cells Share a Common Lineage Regulated by the Geminin Family Members. Neuron, 102(1):159-172.

Contact :

Institut de Biologie de l’Ecole Normale Supérieure (IBENS), Ecole Normale Supérieure, CNRS, INSERM, PSL Université Paris, 75005 Paris, France.

Nathalie Spassky

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